Les autorités locales
prennent leurs responsabilités
Ferney-Voltaire n'est pas une commune excentrée, un îlot isolé dans une lointaine couronne périphérique. Sans galvauder le terme, la commune est placée dans un périmètre repéré comme stratégique, à l’une des charnières de l’agglomération.
Les facteurs objectifs qui y contribuent sont nettement identifiés; le château de Voltaire et son rayonnement en font partie; je renonce ici à les détailler.
Contenir la spéculation
Quasi-enclave dans une aire urbaine dont le centre se trouve hors Union Européenne, les autorités doivent – du fait de cette position singulière et des interdépendances toujours plus marquées entre collectivités territoriales limitrophes les unes des autres, imbriquées les unes dans les autres – prendre leurs responsabilités. Voire plus: nous devons sortir des sentiers battus, innover, oser improviser dès lors que les obstacles nous paraissent par trop infranchissables.
En la matière, la muncipalité sortante de Ferney-Voltaire a pris le taureau par les cornes: par le biais d’un projet de territoire qui concerne le bas de la ville (au sud) près de la douane principale. Appelé «Ferney Genève Innovation», ce projet raisonné et mesuré se trouve à l’opposé de certaines formes d'urbanisme frénétique que l'on peut observer de ci, de là. Il s’articule autour d’une entrée de ville que nous avons l’intention d’appeler place du Jura, bientôt traversée (dès 2019) par un moyen de transport en commun moderne et efficace – un autobus express transfrontalier Cornavin-Gex, le fameux BHNS (bus à haut niveau de service) –, sachant que la cité du Patriarche pourrait être desservie à terme (vers le milieu des années 20) par un tram des Transports publics genevois (TPG).
A vocation économique, sociale et commerciale, mais aussi culturelle et environnementale, voire sanitaire et éducative, ce projet sera bientôt déclaré d'utilité publique. Conçu à l’horizon de l’an 2030, il se mettra en œuvre graduellement, selon la clause du besoin, de concert avec l'«interco» (la Communauté de communes du Pays de Gex). Le dispositif sera doté de moyens permettant de contenir la spéculation immobilière grâce aux procédures codifiées dans le détail d’une ZAC (zone d’aménagement concertée) ainsi que d’une SPL (société publique locale), investie de pouvoirs adjudicateurs définis avec une grande précision par le Code de l’urbanisme.
Il se décline en trois volets
Le projet d’aménagement intègre une dimension forte focalisée sur l’emploi. Il repose sur le lancement progressif d’un pôle d’activités tertiaires à haute valeur ajoutée, à Paimboeuf, dans un périmètre au contact de la ville, adossé à la nouvelle place du Jura. Dédié à la formation professionnelle et supérieure par le truchement d'une "Cité des savoirs" (programmée pour 2018) – dans laquelle s’installera, dans un premier temps, le campus régional du CNAM*** (Centre national des arts et métiers) –, ce secteur a vocation à créer de l’activité sur 180'000 m2 (attributions réparties sur une quinzaine d’années). 3'000 à 4'000 emplois sont espérés ici à terme. Après l’installation du CNAM et du Greta Léman (consacré à la formation continue), les porteurs du projet visent à mettre sur les rails un centre voué au e-learning, prenant en compte les nouveaux rapports aux savoirs en train d’émerger en ce début de XXIe siècle.
Second volet: en fonction des besoins à évaluer au fur et à mesure de l’avancement de la zone d’aménagement concertée publique, il est prévu de créer de manière concomitante de l’habitat accessible à tous, sur 190'000 m2 (également adjugés sur une quinzaine d’années). Je souligne que ce nombre de mètres carrés est sensiblement le même que pour les surfaces à dédier aux nouvelles activités. Il s’agit là d’un autre axe fort, devant se concrétiser au rythme de 150 logements par an – avec 25% de logements sociaux et 20% d’unités dites abordables. A l'horzon des années 30, il est ainsi prévu d’aboutir à 2'500 logements. Dans une première phase, il est question de construire un foyer pour apprentis et étudiants.
Enfin, le troisième volet du projet de territoire «Ferney Genève Innovation» concerne l’actuel secteur artisanal et commercial dit de la Poterie. Ce quartier manque aujourd'hui nettement d’identité et de lisibilité; et risque de la sorte de connaître un lent déclin si rien n’est entrepris. C’est pourquoi on prévoit de le soumettre à une requalification complète. On compte réorienter la Poterie notamment par le biais d’offres axées sur le temps libre: le divertissement et le délassement. Faisant partie du bassin versant aboutissant au lac Léman (au nord de la plage du Vengeron), les trois cours d’eau arrosant la Poterie – le Nant, l’Ouye et le Gobé – feront l’objet d’actions ciblées de renaturation, en vertu du Grenelle de l’environnement et du "Contrat de rivières Pays de Gex-Léman".
Peter LOOSLI
***Héritier de l’esprit des Lumières et des encyclopédistes, fondé en 1794 (issu de la Révolution française), le CNAM est un grand établissement pluridisciplinaire d’enseignement supérieur et de recherche (fondamentale et appliquée) dans le domaine des sciences de l’ingénieur.